19-06-23 – Réforme comptable des associations : quand la fiscalité s’invite discrètement (mais sûrement !) pour les cotisations…
Au 1er janvier 2020, le nouveau règlement ANC 2018-06 entrera en vigueur pour les associations, en remplacement du règlement CRC 1999-01 (ex-« 99-01 »).
Cette réforme a fait et fait encore couler beaucoup d’encre. Les articles dédiés et les dossiers complets se succèdent.
Toutefois, un point passe assez inaperçu alors qu’il touche l’un des aspects fondamentaux des associations : les cotisations… et la fiscalité qui leur est applicable !
En effet, ce serait un tort de penser que le changement introduit par le règlement ANC 2018-06 se limite à une simple évolution du classement comptable des cotisations.
Voyons concrètement ce qu’il en est.
Nouveau classement comptable
Jusqu’à maintenant, selon le règlement CRC 1999-01, les cotisations sont à enregistrer dans le compte 756 et ces produits doivent figurer dans un poste spécifique du compte de résultat.
Le nouveau règlement prévoit, à l’article 142-1, la distinction entre deux catégories de cotisations :
- Celles sans contrepartie : compte 7561…
- Celles avec contrepartie : compte 7562…
Selon la définition donnée audit article, « les cotisations sans contrepartie sont les cotisations sans autre contrepartie que la participation à l’assemblée générale, la réception de publication ou la remise de biens de faible valeur. les autres cotisations sont appelées cotisations avec contrepartie. »
Le débat tient donc à l’existence ou non de contrepartie pour les cotisations versées par les membres.
La fiscalité entre alors en jeu pour mieux cerner cette notion de contrepartie et ses conséquences (fiscales) pour :
- La réduction d’impôt pour les cotisations des membres ;
- L’assujettissement ou non à la TVA de ces cotisations.
Contrepartie et réduction d’impôt
Les règles en matière fiscale pour le bénéfice de la réduction d’impôt pour les cotisations versées par les membres prévoient que l’existence d’une contrepartie s’apprécie en fonction de la nature des avantages éventuellement accordés à l’adhérent ou au donateur.
Doivent être distingués les avantages au contenu purement institutionnel ou symbolique, d’une part, et les contreparties tangibles, sous forme de remise de biens ou de prestations de services, d’autre part.
Le bénéfice de la réduction d’impôt n’est accordé qu’à la condition que ce versement procède d’une intention libérale, c’est-à-dire qu’il soit consenti à titre gratuit, sans contrepartie directe ou indirecte au profit de la personne qui l’effectue (1).
Selon l’administration fiscale, toutes les contreparties ne sont pas de nature à remettre en cause le bénéfice de la réduction d’impôt ; tel est le cas des contreparties à caractère institutionnel (vote lors des assemblées générales…) ou symbolique et de certaines contreparties matérielles.
On notera que ces éléments sont repris dans la définition comptable dans le nouveau règlement ANC et rappelée ci-dessus.
L’appréciation de la contrepartie matérielle et donc de l’application possible ou non d’une réduction d’impôt est à apprécier au cas par cas, selon les principes suivants.
Il n’y a pas de remise en cause de la réduction d’impôt si les objets (insigne, timbres décoratifs, étiquettes personnalisées, cartes de vœux, etc.) remis à chaque adhérent :
- Ont une valeur totale faible (au maximum de l’ordre de 65 €) (2) ;
- Et présente une disproportion marquée, à savoir de « un à quatre » au plus entre la valeur du bien et le montant de la cotisation.
Ces deux conditions sont cumulatives. Dès lors pour une cotisation de 60 €, la contrepartie matérielle ne pourra pas excéder 15 € ; pour une cotisation de 300 € la contrepartie matérielle ne doit pas excéder 65 € (montant maximal toléré).
Un cas de figure est souvent rencontré : l’envoi d’une revue, de bulletins d’information ou d’autres documents ou des adhérents. Cet envoi ne prive pas les membres ayant versé une cotisation du bénéfice de la réduction d’impôt, sous réserve que l’édition et la diffusion de ces publications constitue une activité non lucrative pour l’organisme (3).
Par ailleurs, l’administration fiscale considère que l’application de la réduction d’impôt n’est pas compatible avec un accès à des prestations de services à des tarifs préférentiels ou exclusivement réservés aux membres cotisants (4).
Contrepartie et quid de la TVA ?
Comme les associations en général, les cotisations versées par les membres jouissent d’un point de vue fiscal d’une « présomption » de non assujettissement aux impôts, en particulier à la TVA.
Par contre, les cotisations s’avèrent être assujetties à la TVA si elles constituent la contrepartie d’un service individualisé aux membres, à savoir un service individualisé, avec l’existence d’un lien direct entre le prix du service et l’avantage reçu en contrepartie par le membre preneur du service.
Il est précisé que les cotisations peuvent être assujetties à la TVA quand bien même elles présenteraient les caractéristiques suivantes (5) :
- Un caractère forfaitaire ;
- Une utilisation effective du ou des services variant selon les membres.
Dans ce cas d’espèce, il s’agissait d’une cotisation forfaitaire donnant accès pour les membres à des installations (services).
Ce principe d’assujettissement à la TVA des cotisations en cas de service individualisé aux membres souffre d’une exception, prévue à l’article 261, 7-1°, a du CGI.
Sont exonérés de TVA les services rendus aux membres qui présentent un caractère :
- Social : soutien à des enfants malades et leurs parents, colonies, foyers ou maisons de jeunes, etc. ;
- Educatif ou culturel : bibliothèques, musées, séances de théâtre, etc. ;
- Sportif : mise à disposition de terrains.
Cette exonération de TVA est conditionnée au fait que bénéficient de ces services de « vrais » membres de l’association, c’est-à-dire répondant aux deux conditions suivantes :
- Membre à titre personnel ;
- Membre de plein exercice et permanent ; ce critère exclut les adhésions temporaires (à la journée, à la semaine).
En conclusion
La distinction à opérer au 1er janvier 2020 entre les cotisations avec ou sans contrepartie ne doit pas seulement être abordée sous un angle strictement comptable.
Une analyse des cotisations sous l’angle fiscal doit être menée.
Et, dans l’hypothèse de l’existence d’une contrepartie, les effets seront à apprécier en matière de réduction d’impôt pour les membres et/ou d’assujettissement à la TVA de ces cotisations (voire une extension aux autres « impôts commerciaux »).
(1) : BOI-IR-RICI-250-20, n° 60
(2) : BOI-IR-RICI-250-20, n° 90
(3) : BOI-IR-RICI-250-20, n° 100
(4) : BOI-IR-RICI-250-20, n° 100
(5) : CJUE 21 mars 2002, Aff. 174/00 et instruction 3 CA-94 du 8 septembre 1994